II. Le phénomène de consommation vestimentaire
Notre époque est fondée sur ce principe qu'il faut vivre ici et maintenant, qu'il faut se revendiquer d'être des jouisseurs parce qu'il n'y aurait d'autre alternative pour être heureux que de réaliser tout nos désirs. Pour seul mot d'ordre: "il est interdit d'interdir" 1968. L'idée c'est qu'il ne faut surtout pas réprimer le désir, mais se borner à le suivre et autant que faire se peut jusqu'au bout de la logique du désir selon laquelle tout désir appelle sa satisfaction. Pour se faire notre époque ne se contente pas de flater notre recherche du plasir, elle a mit au point un système très efficace qui sucite le désir et fait sa satisfaction un impératif absolu. Ce système c'est la société de consommation. Comme son nom l'indique, la société de consommation érige en modèle celui qui assumerait totalement de vivre pour assouvir ses désirs. de faite nous pourrions avoir le sentiments qu'il n'y a pas d'autre façon de vivre que de vivre selon ses désirs.
Mais comment la société de consommation s'y prend t-elle pour faire de nous des consommateurs?
1) La Publicité
Si les débuts de la publicité peuvent être constaté à l’Antiquité puisque des fresques annonçant des combats de gladiateurs ont été retrouvé et peuvent s’apparenter à une certaine forme de publicité, ce n'est que vers 1830 que le terme publicité, (action de rendre public) a pris le sens moderne d'« ensemble des moyens utilisés pour faire connaître au public un produit, une entreprise industrielle ou commerciale ». Nous pouvons donc remarquer que le développement de la publicité est lié à celui de l’industrialisation et à l'essor des marchés de grande consommation. De nos jours, la publicité est le poumon de notre société. Au fils des années elle est devenue essentielle au développement de la société mais aussi à notre développement personnel dans la société de consommation. La publicité peut se traduire comme étant une forme de communication de masse, entre un annonceur (ou publicitaire) et le public (ou consommateur).
On peut résumer cette pratique grâce à l'acronyme AIDA :
- A pour Attention : Attirer l’attention de la cible.
- I pour Intérêt : Susciter l’intérêt de la cible.
- D pour Désir : Créer et entretenir le désir envers le produit.
- A pour Achat : Convaincre le consommateur d’acheter.
En effet, pendant longtemps elle a vanté la satisfaction des besoins (vous avez besoin d'un pull, d'une jupe, d'un pantalon, d'un t-shirt? Achetez donc celui ci!) maintenant elle vante la satisfaction des désirs et érige le plaisir sans retenue comme étant un modèle d'existence. Elle laisse entendre qu'être heureux c'est avoir des biens matériels et que les seuls désirs qui vaillent la peine d'être vécus seraient ceux que Platon appelle "les désirs de corps". Du coup nous finissons par ressembler à l'homme que décrit Jean Baudrillard dans "La société de consommation, ses mythes, ses structures"quand il dit " L'homme consommateur se considère comme devant jouir, comme une entreprise de jouissance et de satisfaction."
Pour ce faire la publicité suggestive est utilisée car cette forme de publicité ne fait pas appel aux facultés rationnelles mais aux sens humains, aux sensations et aux pulsions, c’est une approche psychologique.
Le but n’est pas réellement de vanter les mérites du produit ou de la marque mais de faire aimer le produit ou la marque consciemment ou inconsciemment au consommateur. Ce type de publicité se base sur les théories de Freud qui démontrent que nous sommes gouvernés par notre inconscient et nos désirs à cause du « ça » (Freud le décrit comme servant: « seulement à satisfaire les besoins pulsionnels, en se conformant au principe de plaisir »). Donc « le ça désigne la part la plus inconsciente de l’homme, c’est le réservoir des instincts humains, le réceptacle des désirs inavoués et refoulés au plus profond ».Le but est donc de faire imaginer au consommateur une image parfaite du produit à acheter afin qu'il puisse s’identifier au produit imaginaire.En intégrant des images évocatrices, la publicité souhaite vendre du fantasme au consommateur *Fantasme : Représentation imaginaire traduisant des désirs plus ou moins conscients, scénario de l'accomplissement du désir inconscient.Ces publicités sont non seulement basées sur les fantasmes mais aussi sur la projection et sur l'identification: cette conception publicitaire a pour but de donner au consommateur le sentiment d’une reconnaissance dans des personnages et des comportements suffisamment favorables pour que le consommateur ait le besoin de s'identifier à cette représentation fictive. Les plus grands utilisateurs de la publicité suggestive sont les marques de parfums, de vêtements et d'alcool.
Il existe trois autres formes de publicité :
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la publicité persuasive et informative : contrairement à la publicité suggestive, celle-ci tente de convaincre en faisant appel aux facultés rationnelles du consommateur. Il va essayer de le faire réfléchir et de l'informer sur le produit en mettant en avant ses biens faits.
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La publicité argumentative : Elle joue sur le besoin d'appartenance d'un individu. La stratégie du publicitaire sera donc de crée autour du produit un signe qui pourra être considéré comme un signe d’appartenance à la classe visée.
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La publicité mécaniste : elle crée une sorte de mécanisme en utilisant le « matraquage publicitaire » elle ne tente plus de convaincre et d’argumenter mais stimule l’individu par le slogan publicitaire, l’image du produit et le logo
Rousseau parlait lui de "vraies besoins" il marquait une opposition entre les besoin psychologique (manger, boire, dormir etc..) et de « faux besoins » c'est-à-dire des désirs interprétés comme des besoins mais qui relèvent, en fait, d'un effet de mode, ou d'une comparaison de soi avec autrui dont le statut ou le patrimoine sont perçus comme enviables. La mondialisation a intensifié les échanges et la mode devient alors la même plus ou moins partout, ce qui est un atout important pour la publicité, y compris et surtout par internet qui a une très forte présence dans la vie de chacun. D'ailleurs " les célébrités influencent les jeunes qui cherchent à leurs ressembler. La conséquence de cette hausse est que les jeunes sont touché de plus en plus tôt, et de plus en plus longtemps (jusqu'à 25-30 ans) par ce phénomène. Les filles ne sont pas d'ailleurs les seules touché d'après ce que l'on pourrait croire, les garçon aussi se sont mis à suivre les tendances. "Ainsi, les choix vestimentaire des jeunes se sont fortement conditionné par les médias" (Martin et Peter, 2005) Un véritable diktat de la mode s'est montré par cette démocratisation du vêtement, "Une tyrannie des marques est apparue". Dans les foyers ont peut d'ailleurs constater un budget très important consacré aux marques, et le pouvoir d'achat des jeunes est de plus en plus important (40milliards d'euros) ce qui contribue à une véritable aubaine pour les professionnel et les entreprise marketing (Marcilhacy, 2004). ce pouvoir d'achat est surtout issus de l'argent de poche (30 à 60 euros pour un adolescent entre 12 et 18 ans) d'après une étude de Gauducheau (2003). Ils deviennent les première cibles de la publicité, et de leur façon de vivre. Le moteur des jeunes devient la consommations.
2) Pourquoi les jeunes adolescents ?
Chez les jeunes adolescents nous pouvons évoquer en sociologie un phénomène d’imitation face au publicité ou même au stars et aux médias ou classes sociales supérieures.
Pour Gabriel Tarde qui en propose une théorie générale dans les lois de l’imitation 1890 ouvrage qui connaît un grand succès à l'époque:
« L’imitation est une extension à la vie sociale de l'idée de suggestion hypnotique: n'avoir que des idées suggérées et les croire spontanées. »
L'adolescent voit se que la publicité lui offre et il transforme cet objet de consommation ostentatoire en un besoin.
Une telle pratique est sans doute inspirée par une société de consommation désireuse de faire prospérer le marché vestimentaire du cosmétique, de la chirurgie, pour résumer, ainsi nous façonnons notre image.
Selon l'économiste américain Thorstein Veblen, "la consommation est ostentatoire et non rationnelle, elle est destinée à la satisfaction des besoins".
Veblen met ici l'accent sur le caractère social, psychologique et donc évolutif de la consommation.
Comme nous avons pu le voir ci dessus le publicitaire se doute que le jeune ne s'achètent pas de vêtement uniquement parce qu'il en a besoin mais car il y a un effet de distinction ou d'imitation.
C’est pourquoi les publicitaires utilisent des moyens d’influences qui se basent sur les désirs du jeune. Elle développe des arguments, met en place des scénarios afin de susciter le désir en utilisant nos fantasmes.
Cependant dans ces scénarios l'objet n'est qu'un prétexte, un moyen pour vanter notre désir de gloire, d'acceptation de l'autre chez l'adolescent, de son approbation, ou encore pour permettre à l'autre de voir en lui comme si il regardait sa vitrine.
Ainsi habitué à vivre dans l'envie nous saisirons tout ce qu'on nous présentera, persuadés que tout notre bonheur dépend de la possession de tel ou tel objet, on retrouve ici la consommation ostentatoire.
Pour Baudrillard le désir de consommer est en effet lié à des signes, plus qu'à des choses, "avoir la chose" ne suffit pas.
Ce qui importe dans le désir de consommer ce n'est pas l'objet lui même, mais ce qu'il est supposer représenter (pour le psychisme) car un signe représente toujours autre chose de lui même (exemple: signe d'appartenance: le vêtement, les objets, les accessoires de mode) pour montrer qu'on appartient à tel ou tel groupe, ou que l'on suis ou cautionne tel ou tel mode.
Sachant que l'adolescence est le moment où l'individu est le plus sensible aux aspects symboliques de la consommation, il devient vite la cible favorite des publicitaires.
Les produits de consommations sont chez l'adolescent en lien dans leur quête identitaire et d'approbation sociale.
L'adolescent a deux façons de réagir face à ce diktat de la mode soit il rejoint ce qu'en sociologie on appelle la « sous-culture adolescente » ou soit il a en lui le rejet de ce modèle et fait partie de la « contre-culture » qui fait passer un message.
Ceci provoque donc une socialisation différentiel selon le milieu social et l'age.
Le vêtement pour l'adolescent devient alors un marqueur social, il renseigne les autres sur sa position sociale.
A travers la mode et le vêtement on retrouve la lutte pour la distinction entre les classes.
Pourtant les objets qu'on nous vend ne sont rien d'autres que des supports, ils ne sont pas liés à une fonction ou un besoin défini. D'ailleurs si la consommation était de l'ordre du besoin, elle ne serait pas si frénétique.
De par son image et sa tenue vestimentaire, le jeune peut s'exprimer et jouer différents rôles, il peut rester neutre et se fondre au milieu d'un groupe, comme il peut se démarquer individuellement. C'est à lui de décider qu'elle image il veut montrer.
Michel Piquemal - Le Prophète du libéralisme - 2005